Select Sidearea

Populate the sidearea with useful widgets. It’s simple to add images, categories, latest post, social media icon links, tag clouds, and more.
hello@youremail.com
+1234567890

Adieu l’ami Claude.

Cher Claude, né le 4 mars 1936, tu nous as quittés le 12 juin 2020.

Tes talents de musicien et ton amour pour la musique ont débuté bien avant que tu n’empoignes la trompe !

Tu t’es majestueusement éclaté bien avant, avec l’orchestre Rudi Frey à la guitare basse et au saxo, et ta culture musicale est impressionnante !

En 1973, dit-on, du côté du Prévoux, tu goûtes à la trompe de chasse, grâce à la rencontre, entre autres, d’un certain jeune homme nommé Stan Getz.

Et depuis, tu n’as plus jamais lâché ce sublime instrument de torture qui fait vibrer les filles, jusqu’à Vernon, et même bien plus loin, à ce qu’on dit.

Au sein du Rallye Trompes Neuchâtelois (RTN), tu es notre président d’honneur, et spécialiste en partition de basse.

Quand on sonnait… ah !  Qu’est-ce qu’il faisait bon entendre ta basse ronronner ! Un ronronnement rassurant, qui marquait les temps forts, comme un métronome.

Claude, tu étais un passionné et un perfectionniste à plusieurs facettes.

Pour illustrer cela, j’aimerais raconter 2 petites anecdotes que nous garderons en mémoire parmi tant d’autres :

Première Histoire :

Claude était un passionné de grande vénerie.

Donc forcément passionné par la trompe elle-même, au point qu’un jour, il s’est mis en tête d’en fabriquer une. Avec son ami Michel Vermot du Quartier (bijoutier boîtier), ils ont amassé des informations, ont pris contact avec des facteurs de trompes, fait des croquis, élaboré des gabarits, fabriqué des outils spécifiques, ils ont usiné des enclumes spéciales en acier massif en forme de pavillon, ils ont fabriqué des matrices, des filières, des extracteurs, des appareils à viroler, des pinces à créneler, des chalumeaux spéciaux, et j’en passe…un véritable laboratoire de chaudronnerie !

Ils ont découpé selon ces gabarits de longues bandes dans  des feuilles de laiton de 25 centièmes de mm d’épaisseur, ils les ont martelées forgées à chaud et  mâtées à froid comme de fins chaudronniers. Avec une précision d’horloger, ils les ont soudées pour en faire un long tube légèrement conique, de plus de 4m de long. Ils ont ensuite, à l’intérieur de ce long tube, coulé de la colophane chauffée et liquide. La colophane, une fois refroidie et solidifiée, va permettre de pouvoir enrouler le tube sans le plier ni le froisser autour d’un gabarit ad hoc en bois. Ensuite, une fois les anneaux formés, ils ont chauffé pour refondre la colophane, afin qu’elle libère le précieux tube formé en anneaux.

Toujours en suivant leurs gabarits, ils ont alors découpé des sortes de triangles arrondis qu’ils ont soudé ensemble en formant un cornet, cornet qu’ils ont ensuite forgé et martelé avec un marteau spécifique en buis sur leur enclume en forme de pavillon. Environ 300 000 coups de marteau pour la mise en forme du pavillon. Et attention : les coups de travers ne pardonnent pas !

Puis, ils ont brasé une virole décorée, et frappée au nom de : Trompes Quartier (lieu-dit de leur atelier chez Michel Vermot). Par brasage, ils ont ensuite raccordé ce pavillon au tube conique de 4m. Ils ont soudé les pattes-support et ont poli, poli, poli, pour finalement après je ne sais combien d’essais, sortir une première trompe d’Orléans, en Ré, qui sonne, ma foi, vraiment pas mal du tout ! C’est le même instrument qu’au temps de Louis XIV, fait avec quasi les mêmes moyens, le même métal, les mêmes outils qu’à l’époque. Ils ont réussi à faire un instrument qui a la même âme, le même timbre et la même exubérance qu’à cette époque.

Lui, le Claude, il l’a fait !

Chapeau, Claude !

Deuxième Histoire:

Passionné de trompes, il était aussi passionné de fondue et de navigation. Un jour, accompagné de quelques sonneurs du RTN, nous nous rendons au port du Nid du Crô, et embarquons sur le bateau du Capitaine Claude, histoire de se faire une petite fondue entre marins-sonneurs-épicuriens.

Après la fondue, l’ambiance et la bonne humeur qui vont avec, amarrage du bateau près de Portalban-La Motte.

On a passé la nuit dans le bateau.

Le lendemain matin, grand beau temps. Pour se dégriser un peu, on enfile nos costumes de bain de vénerie, on saute au jus, la trompe de chasse à la main, et avec de l’eau jusqu’au haut du ventre, on envoie quelques fanfares glisser à la surface de l’eau : le Point du Jour, la Chabane, la Curée et d’autres. C’est alors que 5 ou 6 autres bateaux et voiliers, par la clameur attirés, nous tinrent à peu près ce langage : « Si le costume est aussi beau que la corne de brume, ceci mérite bien un apéro ! » Oh-oh…Aussitôt dit, aussitôt fait !

Pendant ce temps, à terre, Claude Dellay à l’oreille fine, pêcheur au port de Portalban, alerté par la sonnerie de la curée, avait fumé, épicé et préparé une bonne cinquantaine de bondelles (poissons du lac de Neuchâtel), histoire de rassasier les valeureux sonneurs, et accompagnants. Délices culinaires simples, rires, et musique.

Quelle belle fête improvisée !

Magnifiques journées, et quelle belle équipe on faisait ensemble !

La vie, la musique, l’humour…merci, Claude de tout ce que tu nous as apporté et de tout ce que nous avons pu partager avec toi.

Tu nous manques, Claude !

Eric Nardin, le 20 juin 2020